Audit sur la gouvernance et la corruption au Congo: et si le pétrole expliquait tout?

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Une plateforme offshore d’exploitation de pétrole. © Getty Images/HeliRy

Brazzaville s’arrimera t-elle à la transparence qu’exige l’audit sur la gouvernance et la corruption recommandé par le FMI ? À observer quelques zélés, à lire quelques janissaires irréductibles et à entendre parler quelques exégètes de l’économie africaine, cette question n’est pas saugrenue. D’autant qu’il y a un précédent, avec la dette cachée du Mozambique.

Pour la petite histoire les autorités de Maputo avaient dissimulé une bonne partie de leur dette – 2 milliards de dollars, soit 1,8 milliard d’euros – au FMI. La dette du Congo est de 8 milliards d’euros, soit près de 5 fois celle du Mozambique.

Fruit d’un montage financier complexe mené, en toute discrétion, par 3 banques ( la russe VTB, Crédit suisse et la française BNP Paribas) pour le compte de 3 sociétés parapubliques mozambicaines (Ematum, Proindicus et Mozambique Asset ), l’affaire de la dette cachée du Mozambique plombe aujourd’hui les relations entre Maputo et le FMI. Tout est au point mort depuis les négociations engagées en 2016. L’audit de la dette cachée, confié au cabinet américain Kroll par le Fonds, a révélé, à l’occasion de la publication de son rapport en juin dernier, un trou non justifié de 713 millions de dollars, qui auraient atterri directement dans les poches d’officiels mozambicains, selon Wall Street Journal. Le pire aujourd’hui est que le FBI, après la SEC, le régulateur financier américain, se penche sur ce dossier qui pu abondamment la mal gouvernance et, surtout, la corruption.

La Snpc, ex délégation générale des grands travaux, les dossiers ecair et asperbras, les gestionnaires des fonds prepaids dans le collimateur ?

En ce qui concerne Brazzaville, « il n’est pas impossible que le FMI impose la même recette en matière d’audit qui sera confié à un cabinet dont l’indépendance ne souffre d’aucune contestation « , croit savoir un expert financier proche du FMI. Il n’y aura donc pas de cabinet ayant déjà des intérêts au Congo (KPMG, Ernst &Young, Price Whaterhouse &Cooper, Deloite…).

Les comptes de gestion de la Snpc (société nationale des pétroles du Congo) seront passés au peigne fin, poursuit notre source,. Leur certification par les cabinets d’expertise comptable de renommée internationale pourrait même être remise en cause. En d’autres termes, le nouvel auditeur ne s’appuiera pas sur les comptes de gestion interne certifiés par Kpmg, par exemple. Qui a fait quoi et dans quel intérêt? C’est, entre autres, questions que se posent généralement les auditeurs dans pareilles circonstances. Comme pour se mettre à l’abri de la clameur publique et de l’audit à venir, le mastodonte pétrolier congolais s’est fendu d’un document non officiel pour tenter de se dédouaner à la Ponce Pilate. « À la lecture de ce document, que nous avons refusé d’exploiter, aucun chiffre, ni les montants des transactions menées n’y figurent. Un tract. Le ministre des Finances(ndlr, Gilbert Ondongo) s’est, par conséquent, largement appuyé sur la Snpc pour obtenir de la liquidité via ces dispositifs de financement adossés au pétrole couramment appelés prepaiements.

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Les prepaiements contractés par la Snpc pour le compte de l’Etat résultaient en effet de la demande du gouvernement afin de fournir des liquidités pour permettre la mise en oeuvre de plans de développement infrastructurel« , peut-on y lire.

En clair, la Snpc, au centre des transactions et montages financiers, sera dans la ligne de mire des fins limiers de l’audit indépendant recommandé par le FMI aux autorités congolaises. Ensuite seront passés au peigne fin le dossier des travaux d’envergure gérés par la délégation générale aux grands travaux, les montages des dossiers Ecair, ASPERBRAS, la gestions des liquidités procurées par les prepaiements, le circuit emprunté par ces fonds prepaids avant d’atterrir à la Beac via trésor public…

Existe t-il des paradis fiscaux ? Et quand il ne s’agira pas de taux d’intérêt trop élevés à leurs yeux sur certains prêts, et donc sur les risques potentiels sur les ratios du surendettement du Congo, les experts pourront sortir de leur chapeau « l’absence de transparence et de la mauvaise gouvernance « , spécule, sous couvert d’anonymat, un auditeur qui travaille chez KPMG.  

Comme au Mozambique, il est donc à craindre que le FBI et autres services européens de lutte contre la délinquance financière braquent leurs caméras sur Brazzaville pour solder certains vieux comptes à Beijing pour sa parcée au Congo, sous le nez et barbe des ex conquistadors français. Un expert de l ‘Agence française de développement(AFD) nous avait confié, sous couvert d’anonymat, en 2013, qu’elle jugeait partiaux les appels d’offres internationaux de la délégation générale aux grands travaux. Certaines entreprises chinoises qui rafflent la mise dans le cadre de ces appels d’offres ne sont même pas identifiées en Chine. À qui appartiennent-elles alors? S’interrogeait-il. Vrai ou faux? Toujours est-il que « l’audit sur la gouvernance et la corruption commandé par le FMI pourrait aboutir à des scandales qui donnent des crises d’urticaire« , affirme notre expert financier international. Si tant est possible que le surendettement du Congo a profité à des personnes que l’on appelle à Brazzaville « les intouchables de la République ». Denis Sassou-Nguesso pourra t-il engager une opération toges blanches? Seuls les résultats de l’audit pourraient établir la proportion de gravité des faits ou pas imputable à ceux que les brazzavillois, si friands des matches de Barça, Réal de Madrid et PSG, appellent déjà » le trio arbitral ». Il y a aussi un commissaire du match.

Par Alphonse Ndongo

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