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La République du Congo s’est dotée le 24 avril 2017 de la loi régissant les zones économiques spéciales. Une étape jugée importante dans le processus de mise en œuvre des zones économiques spéciales. Dans l’interview ci-après, Alain Akouala Atipault, ministre congolais en charge des Zones économiques spéciales, 12 mois après son retour à ce département ministériel, fait le point du processus, qui à ce stade, devrait faire passer le Congo du rêve à l’effectivité des ZES au Congo.
IciBrazza: Cela fait 12 mois depuis que vous êtes au ministère des zones économiques spéciales. Pouvez-vous nous présenter succinctement votre département et quel bilan dressez-vous en un an d’exercice ?
Alain Akouala Atipault: Je vous remercie de cette opportunité que vous m’offrez. 12 mois après que le président m’est fait à nouveau ce grand honneur de m’appeler à ses côtés, lui qui a participé au forum Afrique Chine qui s’est tenu à Johannesburg. Au cours de ce forum une annonce importante avait été faite par le président chinois : la Chine m’était à la disposition de l’Afrique 60 milliards $US pour aider le continent à s’industrialiser.
Cette décision va de pair avec une réalité de l’évolution économique de la Chine, qui, dans 30 ans, a donné une impulsion à l’économie asiatique. La géographie de la création de la richesse mondiale, de la croissance économique a changé. Les leaders chinois dans leur vision considèrent que le partenaire naturel à cette nouvelle réalité économique mondiale va se structurer sur des décennies à venir : c’est l’Afrique.
Donc, cette annonce ayant été faite en Afrique du sud, le président de la République, Denis Sassou N’Guesso, qui, dans une vision stratégique, avait déjà anticipée sur ce qui allait arriver, c’est-à-dire, le contre choc du pétrole que nous connaissons aujourd’hui, avait déjà envisagé de moderniser notre pays et l’industrialiser depuis 2009. Ainsi, la création du ministère en charge des zones économiques spéciales, en 2009, intègre cette vision stratégique que le président de la République a de l’avenir économique de notre pays.
A notre actif, nous avions des études de faisabilité qui ont été déjà faites, à cette époque, par des cabinets de réputation internationale (Singapourien, américain, français, européens, etc). Fort de cet actif, la
Chine a eu un regard assez attentif de l’ambition du président Denis Sassou-N’Guesso, en sachant qu’il y a trois pays qui, au sommet de Johannesburg, avaient été désignés comme pays pilote de cet investissement chinois, à savoir, la Tanzanie, le Kenya et l’Afrique du sud.
Alors, le Congo devient le 4 ème pays pilote en Afrique, le seul pays francophone en Afrique à la faveur de la visite d’Etat qu’effectuera le président Denis Sassou N’Guesso, à Pékin, à l’invitation de son homologue Xi Jinping. C’est au cours de cette visite que le Congo va être désigné pays pilote susceptible de bénéficier de certaines sources d’investissement direct que constituent les 60 milliards de dollars US.
Cet argent ne sera pas reparti entre les 4 pays. C’est plutôt les pays qui auront les meilleurs projets,les plus étudiés,susceptiblesdesuccès qui bénéficieront de cet appui financier. A partir de cette désignation, les accords ont été signés à Pékin par les ministres des Affaires étrangères, des finances et des grands travaux. Parmi ces accords, l’un a porté sur la zone économique spéciale de Pointe-Noire, précisément sur le parc industriel de la zone économique spéciale de Pointe-Noire.
Apres la conclusion de ces différents accords, nous avons reçus des experts chinois de China Développement Institute. A noter que cet institut a pour mission essentielle de faire de la réflexion, de la recherche économique sur les potentiels économiques de la Chine, la place de la Chine dans l’économie mondiale, faire de la prospection économique de la Chine ; que sera la Chine de demain. Ainsi, 25 experts sont venus. Et ensemble nous nous sommes rendus à Pointe-Noire. Ils ont travaillé à Brazzaville avec nos différents départements ministériels, différentes directions départementales que ça soit à Brazzaville et à Pointe-Noire, pour recueillir le maximum d’informations.
Nous nous sommes, également, déportés sur le site qui couvre une superficie de 30km2 pour voir la situation. Une chose est essentielle, par rapport, aux conditions de succès d’une zone économique spéciale, c’est la côte maritime, l’accès à la mer. Quand on met en place une zone économique, c’est pour pouvoir faire de l’exportation.
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Les travaux de bornage sont-ils terminés?
Après la visite de ce site, le vice-président de Fund China development est venu à Pointe-Noire pour voir, entendre, avoir les premières
indications des conditions de succès de la part de leurs experts. Quelques semaines après, ces experts sont revenus, faire une restitution au premier ministre de leurs projections. Ces dernières ont été validées par le premier ministre et des ministres concernés.
Nous avons reçu, par la suite, à Brazzaville le vice-président de Fonds Sino-africain qui est venu nous faire quelques propositions sur le type de partenariat entre le Congo et la Chine, par rapport à ce processus. S’en est suivi la réception, il y a de cela quelques semaines, de M. Wong, qui est le Directeur général de la Commission des reformes et de développement de la Chine. Cette commission, au niveau du gouvernement chinois, identifie et valide tous les partenariats que la Chine conclue avec d’autres pays.
Nous sommes allés à nouveau à Pointe-Noire voir le site, à leur grande satisfaction. Là, je tiens à saluer l’activisme de mon collègue Aimé Parfait Coussoud Mavoungou qui, tout de suite, a mis en place ses équipes de manière transversale : Grands travaux, zones économiques et ministère des affaires foncières. On s’est retrouvé à Pointe-Noire. En un mois, nous avons réussis à délimiter et à faire le bornage des 30 km2. Désormais, ces 30 km2 sont bornés des bornes de 2 m et pèse 80 kg chacune.
Aujourd’hui, nous sommes totalement d’accord sur le site. La prochaine étape, nous attendons que la partie chinoise mette à notre disposition le plan conceptuel, qui permettra de savoir comment on va procéder à la mise en place de ce parc industriel ; de savoir quelles sont les industries qui pourront s’y installer.
De notre part, de façon anticipée et prospective en fonction des études de faisabilité qui ont été réalisées par les experts de Singapour, nous connaissons les filières industrielles qui seront développées, notamment au niveau des produits pétroliers, de la pétrochimie, des métaux précieux, des métiers de la métallurgie et de l’ingénierie, du tourisme, de l’industrie alimentaire et de boissons, ainsi que de la recherche.
Bref, des filières industrielles qui vont nous permettre, comme le président l’ambitionne, de faire en sorte que notre pays crée une économie réelle, une économie qui soit capable de voir les minerais, les potentiels de notre pays. Afin de ne plus être exploité à l’état brut pour que toute la chaîne de valeur ne se fasse plus transformer à l’extérieur. Quand vous prenez, par exemple, le pétrole à l’état brut pour qu’il arrive au pétrole lampant, il y a différentes étapes et ces différentes étapes ; ce
sont des formations adaptées, des métiers qui se créent, des richesses qui se créent, etc.
Donc, le but du président, c’est de faire en sorte que demain tout soit transformé dans notre pays. Et cela entraîne la création des emplois. Je vous informe que la zone économique spéciale de Pointe-Noire a un potentiel de création d’environ 28.000 emplois directs et 42.00 emplois indirects.
Pour le président de la République, l’idée de créer les zones économiques spéciales n’est pas une fin en soi. Bien au contraire, c’est pour faire qu’une partie du territoire réunisse toutes les conditions sur le plan des infrastructures, de la fiscalité, de la douane, des facilités administratives et des conditions nécessaires pour pouvoir ouvrir notre pays aux investisseurs aussi bien congolais qu’étrangers. Parce qu’aujourd’hui, la composante la plus dynamique de l’économie mondiale c’est l’investissement.
Ainsi, en ouvrant notre pays économiquement, on le connecte à l’économie mondiale, de manière active, c’est-à-dire, nos matières premières sont transformées, exportées et deviennent une valeur ajoutée.
Le président de la République, lui-même, qui est témoin de l’histoire de notre pays, témoin de l’évolution de la Chine, observateur de l’évolution de l’économie mondiale, a senti que c’est par ce canal que nous allons arriver à un moment donné à bâtir une certaine souveraineté économique. Donc, on ouvre notre pays à l’économie mondiale, les investisseurs privés, directs étrangers vont venir, et cela permet aussi à notre pays, dans la vision du président, de créer le capitanat industriel, c’est-à-dire, permettre à des congolais de devenir de capital industriel ; de permettre aux congolais d’accéder à ce qu’on appelle la propriété industrielle, être propriétaire de son usine, de son entreprise.
A partir de cela, le pays aura la possibilité de créer des emplois et en même temps améliorer les entrées fiscales. Par conséquent, sur le plan de la balance commerciale et économique, le constat sera que les importations perdront du terrain. L’argent que le Congo dépense pour les importations restera dans le pays et créera de réserve financière et entrainera une économie solide. Cette ambition du président, c’est l’économie du troisième millénaire, qu’il est en train de construire.
La zone économie spéciale d’Oyo-Ollombo, un autre pourvoyeur d’emplois ?
Lorsque vous prenez la zone économique spéciale Oyo-Ollombo, l’évidence qui saute à l’œil est qu’elle est destinée à une économie verte et capable de créer 6500 emplois par an. Ainsi, face à ce défi, nous allons pouvoir réorganiser notre système de formation, d’enseignement technique, professionnel et universitaire. Il ne faut plus former les congolais comme on le fait d’habitude. Outre l’accord avec la Chine, nous avons une certaine capacité à nous ouvrir avec d’autres partenaires au sujet de la zone économique spéciale d’Oyo-Ollombo, qui a déjà fait l’Object d’un accord avec l’île Maurice. Du point de vue de l’évolution économique du Congo, la Chine est le partenaire le plus dynamique.
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Pourquoi la Chine fait le choix du Congo et d’autres pays d’ailleurs ?
Lorsqu’on fait une étude des flux de marchandises, des échanges économiques entre l’Asie-Afrique face à l’Afrique-Europe et l’Afrique-Amérique, on se rend compte que le Congo occupe une position stratégique. En effet, le parlement congolais a adopté ce qui constitue désormais le cadre légal, législatif et réglementaire. Cette loi va permettre à tous les investisseurs du monde de savoir comment, pourquoi doit-il venir investir au Congo et qu’est-ce que cela va lui apporter. D’où l’importance des études. Puisque, les études vont nous permettre aussi, en tant que gouvernement, en tant que pays, de savoir qu’est-ce que le pays va pouvoir gagner tout en s’ouvrant. Cela va nous éviter d’avoir, dans notre pays, quelques pirates industriels qui peuvent venir, mettent en place un projet, sans savoir pourquoi le font-ils. Après avoir pris ce qu’ils cherchent, ils ferment l’usine et s’en vont. Et là vous êtes totalement impuissants parce que vous êtes totalement aveuglé. Donc, avec cette loi, nous avons des éléments de base qui nous permettent de faire face à ce genre de situations.
Je pense que notre pays n’a jamais bénéficié d’un tel processus comme celui-ci, avec des études aussi exhaustives. Parce qu’elles ont été économiques, économétriques, infrastructurelles, markéting, environnementales. Ce processus est basé sur une vision prospective allant sur les 20 et 30 prochaines années dans notre pays.
En termes d’impact sur le PIB, en 2022 on peut atteindre un milliard 116 millions de dollars, impact sur la croissance économique, sur la création
de la richesse nationale. En 2026, on peut atteindre 20 milliards 180 millions de dollars et en 2031, on peut atteindre 3 milliard 574 millions de dollars.
Donc, quand vous voyez ce genre de chiffres cela vous donne une idée de ce que le président veut réellement faire, pas pour lui-même, mais pour les générations actuelles et avenir, c’est là qu’on sent la dimension d’un homme d’Etat, en différence bien entendue avec nous autres petits politiciens à la petite semaine.
Depuis que nous avons accédé à l’indépendance, Denis Sassou N’Guesso essaie de trouver le modèle économique qui peut s’adapter à notre pays et conduire notre pays d’avoir une maitrise de son destin économique. En ce sens, quand le pétrole marche, cela rapporte beaucoup d’argent au pays, mais quand on fait le ratio entre les emplois créés dans le secteur pétrole et les besoins des populations, notamment des jeunes, on déduit que le secteur pétrolier ne crée pas beaucoup d’emplois. Certes, il apporte beaucoup d’argent dans notre pays.
Depuis la nuit des temps, le président cherche ce modèle. Et je pense qu’à travers ce partenariat avec la Chine et d’autres, il ouvre une piste, il ouvre une voie qui devra être poursuivie par les générations actuelles et à venir. Et le texte de loi, enrichi et adopté en conseil des ministres du 5 avril puis par le parlement le 24 avril, marque le couronnement de nos efforts déployés 8 ans durant pour donner corps et âme aux zones économiques spéciales.
Le partenariat Chine-Congo, en parlant de la zone économique spéciale de Pointe-Noire, permettra-t-il au Congo de connaitre une croissance économique dans la durée ? Pourra-t-il impacter dans le recul de la pauvreté ?
Je vous ai donné les chiffres sur l’impact, sur la création de la richesse nationale, les emplois crées, vous voyez que ce sont des emplois qui, de par leur niveau d’exigence de qualification ou de technicité, sont des emplois qui vont exiger un certain niveau de formation. Donc lorsqu’un pays, un peuple a des ressortissants qui ont un certain niveau de formation, non seulement cela accroît le niveau culturel général du pays, mais cela permet également l’émergence de nouveaux citoyens.
En clair, pour le président c’est un processus qui va impacter sur notre société ; quand vous avez 3 milliards et demi de dollars de création de richesse nationale, forcement cela impacte sur la vie des populations. Quand on vous donne des séquences : 2022, 2026, 2031 et certains expressions vont jusqu’à 2040, donc c’est classer le pays sur une nouvelle orbite du développement. Et, si nous faisons l’effort par rapport au territoire imaginaire que nous avons tous, eh bien ! Nous allons avoir un Congo nouveau, y compris dans la vie de tous les jours, les personnes ne s’identifieront plus, ne se détermineront plus en fonction de leur appartenance ethnique. L’appartenance ethnique interviendra comme dans beaucoup de pays comme étant un patrimoine de votre culture, mais ne sera plus décisive dans la relation sociale que nous entretenons.
Donc cette modernisation de l’économie nationale aura forcément un impact sur la modernisation de notre pays ; une modernisation sociale, culturelle érigée, faire naître un congolais de type nouveau, comme on le disait à une certaine époque, et à ce moment-là les citoyens, dans l’exercice, de leur droit démocratique ne vont plus se prononcer parce que Akouala est originaire de Gamboma, tous les gangourous doivent être derrière lui, mais se prononceront, parce que je suis ingénieur-chimiste cadre dans une entreprise de pétrochimie. C’est cela le Congo de demain que veut bâtir Denis Sassou-N’Guesso. Pour cela, il est clair, quand vous voyez ce potentiel d’emplois, on peut conclure qu’il ne satisfera pas seulement des congolais qui sortent des universités congolaises, il s’adresse aussi à ceux qui sont formés à l’extérieur qui parfois hésitent à revenir au pays. On comprend mieux le pourquoi et le président a cela à l’esprit.
A ce moment-là, on aura des pépinières d’entreprises, c’est-à-dire qu’au niveau des zones économiques spéciales on pourra accueillir des chefs d’entreprises, des jeunes qui veulent créer une entreprise. Il y aura une organisation adaptée aux congolais déjà engagés dans les affaires, et ceux qui veulent s’y lancer pour les accompagner.
Une fois qu’ils seront solide, sortiront de la pépinière ou incubateur, ils pourront voler de leurs propres ailes. C’est là que le président pense que nous allons pouvoir jouer le rôle de notre émergence : avoir le taux de croissance, avoir des infrastructures, mais c’est aussi avoir des compatriotes, devenir justement des acteurs industriels importants.
Au regard de la vitesse à laquelle les choses se passent, les Congolais peuvent-ils se dire que le lancement des zones économiques spéciales est éminent ?
Moi qui vous parle, je rêve de ce moment. J’imagine déjà le scénario de ce lancement. Parce que, quand nous allons à Pointe Noire, on sent l’attente de la population. Pour le lancement, étant donné que c’est un partenariat avec la Chine, nous allons le définir ensemble avec la Chine. Lorsqu’elle nous remettra les conclusions de ses études, c’est à ce moment précis, que nous allons définir le schéma critique, une espèce de chronogramme : T-0 ; T+1 ; T+2 qu’est-ce que nous devons faire. Sur ce point, le président insiste qu’on travaille au rythme des chinois. Donc, le moment viendra et je vous dirai la date exacte du lancement des travaux des zones économiques spéciales de Pointe Noire.
S’agissant des zones économiques spéciales d’Oyo-Ollombo, à quel niveau se situe leurs études. Est-ce une vue de l’esprit ?
Les zones économiques spéciales n’ont jamais été une vue de l’esprit ! Même si l’impatience des populations se fait ressentir. Quant aux dossiers sur mon bureau : la loi étant adoptée, on doit passer par la mise en place des organes qui vont assurer la gouvernance économique et juridique de ces zones économiques spéciales. Aussi, travailler d’arrache-pied pour le démarrage de la zone économique spéciale de Pointe-Noire.
Il y a une chose que nous devons avoir à l’esprit, c’est l’accord de partenariat que le président a signé lorsqu’il était en visite d’Etat à Port-Louis sur la zone économique spéciale d’Oyo-Ollombo. L’île Maurice n’attend que la loi soit effective également. Donc, il y a des fortes chances qu’au cours de la même année du lancement de la ZES de Pointe Noire que les choses aussi bougent du côté d’Oyo-Ollombo.
Sur ce, je me ferai fort de réactiver justement cet accord. Nous sommes toujours en relation avec les amis de l’île Maurice. C’est vrai les gouvernements changent, mais il y a ce qu’on appelle la continuité de l’Etat. Comme la loi est adoptée, je crois on va réactiver cet accord.
2017 va être une année extrêmement intense à notre satisfaction bien sûr !
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