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Après une visite de travail de 72 heures dans la capitale française, Denis Sassou N’Guesso est rentré au pays ce jeudi 09 juillet. Au salon présidentiel de l’aéroport international Maya-Maya, il s’est livré à l’exercice habituel avec la presse locale et international. La coopération Congo-France, la crise centrafricaine, le dialogue national inclusif, les 11èmes jeux africains, autant de sujets qui ont constitué le menu de l’échange entre le président congolais et la presse. Nous en publions l’intégralité ci-dessous.
Monsieur le Président, bonjour et bon retour au pays. Vous rentrez de Paris en France où vous avez eu des entretiens avec les dirigeants français, dont le président François Hollande. Quelle appréciation portez-vous sur l’Etat actuel de la coopération entre le Congo et la France ? Est-ce que entre Brazzaville et Paris, c’est le dégel ?
Non, on ne peut pas parler de dégèle comme s’il y avait la neige et la glace partout ! On ne peut pas parler de dégèle, parce qu’entre la France et le Congo, il ne s’est pas produit des événements majeurs, qui auraient porté atteinte aux relations de deux pays. Voilà pourquoi, avec les plus hautes autorités françaises, nous avons fait le point de ces relations. Nous avons constaté qu’elles se portent bien, malgré les apparences. Elles se portent bien au plan politique, diplomatique, économique… Les grandes sociétés françaises opèrent au Congo, Total, Bolloré, SGEC… Sur le plan culturel aussi, nous avons constaté que les relations entre nos deux pays se portent bien
Nous avons aussi dit que là où il y avait des faiblesses ou quelques problèmes, tels que sur le plan judiciaire, il ya quelque accroc, cela mériterait d’être regardé et corrigé. Cela arrive dans les relations qui unissent les Etats dans le Monde. On a vu les situations entre la France et l’Amérique, on peut ou ne pas être d’accord sur tel ou tel autre point, mais on se retrouve et on corrige. Cela ne signifie pas que les relations entre les deux pays seraient arrivées à un point de grand froid pour parler de dégèle.
Donc, nous avons fait le tour de toutes ces relations et nous avons constaté qu’elles se portent bien et que là où elles se portaient moins bien, nous avons les moyens d’apporter les corrections.
Vous avez, Monsieur le Président, évoqué avec votre homologue François Hollande la situation de la Centrafrique. Quel est le regard que vous deux avez porté sur le processus de retour à la normale dans ce pays ?
La France et Congo ont toujours marché, je pourrais dire, la main dans la main dans le processus en RCA, dans la recherche des solutions. Au début on a vu Sangaris, le contingent congolais en RCA travaillé à coude à coude, il y a eu la MISCA, l’intervention des Nations Unies pour obtenir la sécurité, une certaine stabilisation de la situation en RCA. Dans la marche du processus de transition, nous nous sommes soutenus mutuellement, il n’ya pas eu de divergences majeures. Donc aujourd’hui, après la tenue du forum de réconciliation nationale en RCA, à la lumière des rapports qui m’ont été faits, dernièrement, par l’autorité chargée d’organiser les élections et même par le général Babacar Gaye, chef de la mission des Nations Unies, nous pensons que le cap peut être placé face aux élections, avec un timing fixé. Nous pensons que d’ici la fin de l’année, on devrait avoir achevé le processus électoral en RCA.
Ce sont des efforts de la communauté internationale. Aujourd’hui, il reste une difficulté dans la mobilisation des financements. Nous avons aussi dit que le dernier effort qu’on devrait déployer devrait mis sur la mobilisation des moyens pour la tenue des élections. Le moment était venu de donner le dernier coup de pouce pour la tenue d’élections pour ne pas permettre que le processus électoral ou le processus tout court, s’enlise. Donc l’option que nous avions prise est celle de tout faire pour qu’il y ait élection en RCA d’ici la fin de l’année.
La conférence de Paris sur les changements climatiques a été aussi au menu de vos échanges avec le président français. Quelle est la contribution que la France attend du Congo et de son Président dans le cadre de ce sommet prévu en décembre prochain ?
Je crois que les autorités françaises sont informées des efforts que nous avons toujours déployés ici, au Congo, autour de cette question. Elles n’ignorent pas qu’à un certain moment, surtout avant RIO+20, le Congo avait été désigné porte-parole de l’Afrique à cette rencontre. Nous avons toujours été présents au débat depuis Copenhague.
Et à l’intérieur du pays, nous accordons une grande importance à ces problèmes d’environnement. D’où le grand programme de reboisement que nous avons décidé d’engager dans le pays et d’autres. Par exemple, les efforts que nous déployons avec les autres dirigeants de cette sous région pour préserver les forets du bassin du Congo : 220 millions d’hectares de forets.
Donc les autorités françaises savent que nous allons prendre une part active à ce débat. Nous insistons sur le fait que les pays africains et même les autres pays du tiers monde, pauvres qui subissent lourdement les conséquences des changements climatiques sont en droit d’attendre des grands pays industrialisés, principaux pollueurs, des actions concrètes. L’on ne peut pas continuer à rester sur des promesses vaines qui ne s’accomplissent pas, comme on l’a vu après Copenhague, avec des financements de plusieurs centaines de milliard d’euros, qu’on a pas vus, ou après Cancun, avec ce fonds vert qui traine encore d’atteindre son point d’efficacité, avec des procédures bureaucratiques diverses.
Nous pensons que nous allons apporter notre contribution comme d’habitude. Nous insisterons pour que les autres partenaires apportent à l’Afrique ce qui est attendu. Et dans le cas présent, nous travaillons avec les autorités françaises et les autres partenaires européens, pour ne pas dire les pays développés autour du thème de l’énergie pour l’Afrique.
Nous allons demander à la communauté internationale d’aider l’Afrique d’avoir l’électricité : l’électricité pour l’Afrique. On ne peut pas continuer à voir sur des grosses cartes, Google et autres, le monde entier éclairé et le gros trou noir sur la carte c’est l’Afrique, qui n’a pas de lumière, pas d’électricité. Tout le monde sais que l’électricité c’est le développement.
Nous allons, nous africains, travailler en liaison avec les autorités françaises qui sont engagées aussi, notamment l’ancien Ministre Borloo qui travaille sur ce dossier de l’électricité pour l’Afrique. Nous pensons que l’Afrique va d’une seule voix, poser le problème à la communauté internationale, à l’occasion de la COP 21, pour que l’on finance la production de l’électricité pour l’Afrique, parce que le potentiel existe, que ce soit en hydroélectricité, du solaire, production de l’électricité par le gaz, l’énergie propre, il faut donner l’énergie à l’Afrique. Je crois que, pour nous, cela sera un débat important. Mais nous allons contribuer à la COP 21 à Paris.
Monsieur le Président vous avez certainement informé vos interlocuteurs français de la tenue du dialogue national inclusif qui s’ouvre le 11 juillet au Congo. Quelle appréciation ont-ils eu de ce dialogue ? Et puis, ici au pays, il y a des compatriotes de l’opposition, notamment qui ne veulent pas aller au dialogue. Quel message pouvez-vous leur adresser ?
Les autorités françaises sont nos partenaires. A l’occasion de telles rencontres, nous échangeons des informations sur la situation dans nos pays. Et j’ai naturellement donné les informations au sujet de l’évolution du processus démocratique de notre pays, les mesures que nous prenons. Par exemple, dernièrement la consultation et, maintenant le dialogue. Je pense que ces informations ont été bien reçues par nos partenaires.
Je crois que c’est une démarche pédagogique, démocratique et ouvertes. Je ne crois pas qu’il y ait des meilleures mesures, en tout cas, en ce qui nous concerne, celles qui consistent à faire que le peuple s’approprie son propre processus de développement.
Ici il s’agit de la démocratie, il s’agit aussi du développement économique et social. Il faut donner au peuple, l’occasion de s’approprier son propre processus de développement. Voilà pourquoi, ces consultations sont larges, voilà pourquoi ce dialogue est ouvert, inclusif. Je ne vois pas comment on peut refuser à un peuple, le droit de s’interroger sur sa propre vie, sur ses institutions et sur leur avenir. Je crois que c’est une bonne chose, je ne parle pas à la place des autorités françaises.
Je pense qu’au niveau des observateurs en général, c’est une démarche qui est appréciée, elle est ouverte et elle n’exclu personne. Ceux qui choisissent les sujets qui devraient être discutés, ils sont libres de penser ainsi. Mais on n’a jamais vu un peuple qui pourrait refuser le fait qu’on lui donne l’exercice de son propre pouvoir. Que ce soit à travers le dialogue, ou même à travers un référendum, c’est le peuple qui s’approprie son propre pouvoir et décide de ses propres affaires.
Nous venons de le vivre en Grèce, le peuple Grec, à tort ou à raison, a décidé de ses propres affaires. Ce n’est pas nouveau, même en France on a observé dans l’histoire comment le peuple français en 1958, par exemple, a décidé de l’avenir qu’il fallait donner à ses propres institutions. Lorsqu’il s’agissait de construire l’Europe (traité de Maastricht), les peuple d’Europe et de France ont été consultés, ils se sont prononcés, et c’est cela la démocratie par excellence.
Donc ce que je demande est que le peuple participe activement à ce débat, parce qu’il s’agit de son histoire. Et, il n’y a que ce peuple qui peut la faire. J’invite, au fond, tous les acteurs politiques et sociaux à prendre part à ces discussions qui sont ouverts et qui sont, à mon avis, libres. C’est le seul message que je puisse transmettre.
le président, on a parlé de politique, d’économie et de culture Brazzaville va abriter un rendez-vous sportif majeur, à savoir les Jeux Africains. A moins de deux mois de l’événement, est-ce que le gouvernement sera prêt ? Quel message pouvez-vous lancer aux Congolais et jeunes sportifs africains à ce sujet ?
C’est toujours avec une grande émotion que je parle des jeux africains, parce que nous étions des jeunes cadres dans ce pays, il ya 50 ans. Nous lavions organisé dans ce pays les premiers jeux africains. En 1965, nous étions des jeunes cadres dans ce pays et avions soutenu l’organisation des premiers jeux africains, ici.
Peut être que nous ne dormions pas 4 heures dans notre lit. On était débout la nuit comme le jour. C’était une fierté pour nous de prendre part à la construction du stade Massamba-Débat. Parce que ce stade a été construit en 1965 par les Congolais, presque les mains nues. On n’avait pas de ressources, c’était tout le peuple qui s’était levé pour obtenir le succès des premiers jeux africains.
Et aujourd’hui, l’Afrique nous fait, à notre peuple, l’honneur de recevoir les 11èmes Jeux Africains 50 ans après. Donc, les Jeux Africains sont revenus dans leur berceau, ici. Le peuple congolais devrait se sentir fier de cet honneur et se mobiliser pour assurer le succès des jeux, comme leurs anciens l’ont faits, il ya 50 ans. C’était même plus dur. Je passe même sur les détails, sur le déroulement de ces jeux mais, tout le monde s’était levé pour assurer le succès des jeux.
Aujourd’hui, je crois qu’un effort important a été engagé dans la réalisation des infrastructures. Cela ne suffit pas. Il faut des hommes, les jeunes, les moins jeunes, même nous autres qui ne sommes plus jeunes, nous devrons tous nous lever avec beaucoup de fierté. Il faut que le peuple congolais se sente fier de ce qui va se passer ici. Parce que toute la jeunesse africaine va se retrouver à Brazzaville, au Congo. Nous devons, coûte que coûte assurer le succès de ces jeux. En ce qui concerne le gouvernement, je crois qu’il mettra tout en œuvre pour qu’il en soit ainsi
Les autres africains qui vont venir au Congo, doivent se sentir qu’en venant au Congo, ils sont comme chez eux. Le Congo est un pays ouvert, son peuple, est un peuple accueillant, Brazzaville sera toujours Brazza la verte qui va accueillir toute la jeunesse africaine, elle a l’habitude de le faire.
Propos recueillis par Christian Pias
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